On ne touche pas aux traditions vivantes! Les Vert.e.s de la Ville de Fribourg l’auront appris, mardi soir, lors de la révision du règlement de police. Leur proposition d'interdire les coups de canon lors de la Fête-Dieu a essuyé les tirs nourris d’une majorité du Conseil général.
Dans l’un de ses 58 articles, le nouveau règlement général de police de la Ville de Fribourg stipule que «le tir de coups de feu et de coups de canon est interdit». Dans son projet de texte, le Conseil communal a toutefois tenu à rajouter que «des dérogations peuvent être accordées dans des cas exceptionnels, en particulier en présence d’un intérêt public ou privé prépondérant». Des exceptions que le groupe Les Vert.e.s a justement voulu supprimer par voie d’amendement. Cette proposition a suscité un torrent d’émotions dans le plénum parce que, même si d’autres célébrations commémoratives sont également concernées, elle visait directement la Fête-Dieu en cherchant à faire taire les traditionnels tirs à blanc au canon pratiqués par la Batterie de campagne 13 dans ce cadre-là (voir signification ci-dessous).
«Les coups de canon aux aurores sont tirés au moins depuis 1643 et ils font partie de la tradition», a rappelé Jean-Thomas Vacher. Aux yeux du chef du groupe Le Centre/PVL, «cet amendement porterait atteinte à la liberté religieuse et serait une restriction que l’on voudrait imposer à cette cérémonie à laquelle assistent toutes les autorités religieuses, politiques, universitaires et j’en passe. C’est une fête qui attire des gens venus non seulement de la ville mais aussi de tout le canton.» Et Jean-Thomas Vacher de conclure: «Ces huit coups de canon sont un rappel de paix et non pas de guerre. Les armistices sont d’ailleurs célébrés par des coups de canon.»
«Une réglementation superflue, gratuite et futile» «Pas mal de gens sont attachés à cette tradition vivante et à la fameuse Batterie 13 qui s’entraîne pour cela tout au long de l’année et a des activités là autour. Il n’y a pas si longtemps, les canons étaient d’ailleurs entreposés juste à côté de l’Hôtel cantonal où on siège en ce moment», enchaîne Maurice Page (Centre gauche-PCS). «Alors, on peut tout vouloir réglementer, mais empêcher quelques coups de canon une fois par année est vraiment superflu, gratuit et futile.»
Pour de nombreux élus, à l’instar de Claude Schenker (Le Centre), cette exception doit être respectée pour un événement si apprécié. «Nous ne devons pas sacrifier pour des raisons purement idéologiques ou politiques une tradition qui, je pense, plaît à une majorité de personnes ou en tout cas ne déplaît pas à grand-monde. Elle fait partie du décorum et de la vie de notre cité», souligne encore Pascal Wicht (UDC)
Et si on mettait la même passion et la même ferveur pour des choses importantes!
Parlant en son nom, Sophie Delaloye (PS) a estimé qu’il était tout à fait possible de célébrer Dieu sans tirer des coups de canon. «Je suis Valaisanne et je vous assure que j’ai assisté à un nombre incroyable de cérémonies de la Fête-Dieu sans cela, ce n’est donc absolument pas indispensable. En plus, cela n’a rien à voir avec la liberté religieuse. Avec la tradition, je veux bien.» De son côté, sa camarade Rana Bassil aimerait vraiment qu’on lui explique comment «célébrer Dieu avec des tirs de canon est un acte de paix». Quant à Stefania Boggian (Les Vert.e.s), ce débat émotionnel l’a incité à rêver: «Si l’on mettait la même passion et la même ferveur quand il s’agit de sujets environnementaux ou d’inclusivité, des choses importantes, ce serait quand même très chouette.» Au final, l’amendement des Vert.e.s a été rejeté par une large majorité du parlement communal.
Signification des tirs
> 1er coup de canon: commencement de la messe.
> 2e et 3e coups de canon: moment de la consécration.
> 4e coup de canon: départ de la procession.
> 5e coup de canon: bénédiction au reposoir, ancienne Poste.
> 6e coup de canon: remise en route de la procession.
> 7e coup de canon: bénédiction au reposoir, à la Cathédrale.
> 8e coup de canon: fin de la célébration.
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